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Carbonfact, ou la mesure de vos produits de consommation courante

Aujourd'hui, nous partons à la rencontre de Martin Daniel, co-fondateur de Carbonfact.

Il revient sur son expérience et les raisons qui l'ont poussé à devenir entrepreneur. Questions climatiques, intérêt général et empreinte carbone : il nous raconte tout. 

C'est parti. 

En 2021, après plusieurs années auprès des plus grandes entreprises de la Silicon Valley, Martin Daniel s’associe à deux autres entrepreneurs pour créer Carbonfact. Son but : aider les clients à mieux identifier les impacts carbones des produits textiles qu’ils achètent… et les marques à les faire mieux connaître.

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(Martin Daniel : Co-fondateur de Carbonfact)

Est-ce que vous pouvez vous présenter, quel est votre parcours ?

J’ai commencé ma carrière chez Google, puis j’ai travaillé pour l’entreprise fifty-five où j’ai découvert le monde merveilleux de la data. J’ai passé les cinq dernières années à San Francisco avec Airbnb. J’y dirigeais une équipe d’une quinzaine de data scientists qui travaillaient sur différentes questions liées à l’utilisation des données. 

Et puis je me suis intéressé à ce que la technologie pouvait faire de bien pour la société. Rabelais disait « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme »… et c’est encore plus vrai pour la data science ! 

Qu’avez-vous décidé alors ?

En 2014, j’ai alors créé l’association Data for good. Elle regroupe encore aujourd’hui plusieurs milliers de bénévoles, des gens qui veulent mettre à disposition leur temps pour des projets au service de l’intérêt général

J’ai aussi lancé en mars 2021 le site covidliste.com, qui est devenu la plus grande liste d’attente pour accéder à un vaccin contre le covid 19 en France. Plus d’un million de volontaires à la vaccination ont été notifiés pour recevoir une dose de vaccin avant qu’ils ne soient éligibles, en permettant aux centres de vaccination d’écouler les doses de vaccin qu’ils avaient en trop. 

Ce site s’est développé avec beaucoup de bénévoles, 200 personnes ont travaillé dessus, avec un code mis en open source. On retrouve toujours la même dynamique de dire « Comment mettre à disposition d’une question sociétale plus large ce que j’ai appris dans le privé avec les stars de la Silicon Valley ? »

Et puis est venu Carbonfact...

J’ai démarré Carbonfact avec Marc Laurent et Romain Champourlier, avec qui j’ai travaillé sur Covidliste. On a décidé de se lancer en juin 2021.

Marc Laurent est un ancien investisseur (il a notamment participé au financement de Doctolib...) et Romain Champourlier, l’ancien directeur technique de JobTeaser, gérait une soixantaine de développeurs dans son équipe. Tous les trois, nous avions envie de faire quelque chose pour le climat. 

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On a quitté nos jobs, qui étaient bien confortables, et bien payés, pour entreprendre et nous lancer dans ce domaine. Nous faisons partie de cette génération d’entrepreneurs qui veulent retrouver du sens en appliquant nos talents et nos compétences à la question brûlante du climat. 

Pouvez-vous nous présenter Carbonfact ? Comment ce site fonctionne, à quoi il sert ?

L’objectif de Carbonfact est de mesurer l’empreinte carbone des produits de consommation courante. Lorsque vous achetez un produit, vous pouvez connaître son prix mais pas son impact environnemental. 

Nous sommes pourtant dans une situation critique en termes d’émission de gaz à effets de serre. Sur 55 milliards de tonnes de carbone émis par an, 5 milliards proviennent de l’industrie textile. Et il peut exister des différences très importantes entre des produits qui ont l’air similaires. 

Ainsi, si vous comparez une paire de baskets en nylon et une paire en matériaux recyclés, vous obtenez quasiment la même chaussure sauf que l’une émet quasiment 20 fois plus de CO2 que l’autre.

Carbonfact permet à des sites d’e-commerce ou des marques d’avoir un tiers de confiance qui vient mesurer l’empreinte carbone de leurs produits et les comparer à une moyenne dans leur catégorie. Ils peuvent ensuite avoir des modules installés sur leur site : les clients ont la possibilité de cliquer, pour avoir plus d’information et acheter en conscience des produits moins carbonés. 

Quels sont ses utilisateurs principaux ?

Nous voulons aider les sites marchands à développer ces solutions. Ils sont en demande car il y a une population grandissante de clients qui demandent des comptes sur les questions climatiques. 

Ils ne veulent pas faire de green washing ou juste répéter les plans marketing des marques. Ils ont besoin d’un tiers impartial qui se base sur des datas scientifiques et technologiques et c’est ce que nous leur offrons.

Nous proposons notre solution à des marques qui se positionnent sur les questions responsables et écologiques, et qui vont vendre en ligne. Une marque qui se lance aujourd’hui et qui essaie d’avoir une empreinte carbone la plus faible possible, nous allons pouvoir l’aider à avoir un discours plus scientifique et factuel grâce à notre outil. 

Notre module sera ensuite vu par les acheteurs de ces marques. Au final, on parle au consommateur, pour l’aiguiller avec des informations tangibles. 

Comment vous est venue l’idée de ce site ?

Des spécialistes de Stanford ont analysé l’impact d’un affichage sur un produit, notamment sur le sucre. En indiquant qu’il en contenait beaucoup, ils ont fait baisser la consommation nationale de sucre de 7 à 10 %. C’est un parallèle intéressant à mener avec le carbone.

carbonfactSi vous mettez le poids carbone d’un produit sous les yeux du public, il y aura une prise de conscience. Et c’est ce que nous voulons obtenir.

Quelle est votre méthode de calcul pour déterminer l’empreinte carbone d’un produit ?

Il y a une idée un peu préconçue sur l’impact carbone, par exemple le fait que le transport des vêtements compte alors qu’il pèse en fait assez peu dans l’empreinte finale de celui-ci. Ce qui va beaucoup impacter, ce sont les matériaux utilisés. 60 % de la variance de l’empreinte carbone se retrouve dans les matières utilisées. 

Ce qui est énorme : l’origine d’un coton ou sa certification éventuelle vont changer absolument tout sur l’empreinte finale. 

D’ailleurs, ce n’est pas parce que c’est produit loin que c’est carboné, ça l’est parce que pour faire des vêtements vous utilisez des machines et que celles-ci fonctionnent avec des énergies carbonées. Il y a des variances très importantes aujourd’hui selon les pays. La France a une empreinte carbone de 100 g de CO2 par kWh produit, l’Allemagne est autour de 500 et la Chine de 800. La zone de production modifie tout.

Or, si vous n’êtes pas un peu initié, c’est très difficile de le savoir. C’était un truc d’expert, ça l’est un peu resté, et on essaie de démocratiser tout ça, d’offrir un accès simple à quelque chose d’un peu obscur.

Sur quoi vous appuyez-vous pour effectuer ces estimations ?

C’est compliqué parce que, dans le carbone aujourd’hui, il n’y a pas de norme comptable définie. C’est comme si chaque entreprise avait sa propre définition du chiffre d’affaires. Mais tout ça est en train de se mettre en place.

Il s’avère qu’il y a beaucoup de travaux scientifiques et des années de recherche sur ce sujet, avec des travaux d’harmonisation en cours au sein de la Commission européenne.  Il y a également l’Ademe et sa base Impacts® qu’on va utiliser, des travaux du MIT… On prend ce qu’il se fait de mieux et de plus avancé et on l’utilise.

Cette technologie est open source, on le fait de façon transparente. Vous pouvez voir à tout moment ce qui joue dans le calcul. La transparence est notre valeur cardinale, d’autant plus que c’est extrêmement opaque dans le textile. Les distributeurs laissent filtrer très peu d’informations. 

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Mais quand je vous dis que le nylon est à 96 kg de carbone, c’est un chiffre qui vient de travaux de scientifiques.
On peut interroger la plateforme pour accéder à ces données.

Il s’agit d’un modèle évolutif. Vous parlez souvent d’un équivalent de Wikipédia pour l’empreinte carbone. Comment espérez-vous que les gens se l’approprient ?

Je crois beaucoup au fait que les gens puissent s’approprier des outils. Par exemple covidliste a été mis à disposition, et 200 bénévoles sont venus travailler avec nous, 50 développeurs se sont penchés dessus. Pour Carbonfact, on a créé une communauté de gens spécialisés sur ces questions et qui donnent des coups de main. 

En le développant en open source, tout le monde peut l’améliorer. C’est aussi l’une de nos valeurs.


Nous espérons que cette interview vous aura autant captivé que nous.

Un grand merci à Martin Daniel, pour avoir pris le temps de répondre à nos questions, et de nous avoir si bien expliqué l'importance de notre empreinte carbone ! 

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